Radama II, tout comme le premier du nom, est acquis au modernisme. Son désir de progrès semble devoir ouvrir une ère de développement rapide. Mais il s’aliène le parti conservateur et réactionnaire en prenant certaines décisions prématurées, surtout en donnant au Français Lambert une charte qui lui confère un monopole sans contrôle sur les mines et les terrains du nord de l’île. Son règne sera très court: arrivé sur le trône en 1861, il sera étranglé avec une écharpe de soie (il est tabou de verser le sang royal)
le 12 mai 1863.
Ses successeurs seront sa femme Rasoherina (1863-1868), sa cousine Ranavalona II (1868-1883) et Ranavalona III (1883-1896). Reines représentant la caste d’Andrianampoinimerina, elles auront pour époux, selon l’usage établi par Ranavalona Ire,
le Premier ministre en l’occurrence Rainilaiarivony de la caste hova qui symbolise la bourgeoisie au pouvoir (Manjaka Hova).
Les quatre reines favoriseront le retour des Européens à Antananarivo. Retour qui permettra la reprise du travail avec une intensité d’autant plus grande que des éléments laïcs se joindront aux instructeurs missionnaires. Le développement et le progrès dans la ville dépendront des architectes et ouvriers qualifiés que l’Europe envoie.
Les premiers à se remettre au travail sont les missionnaires chrétiens qui entendent doter la capitale de temples et d’églises. C’est donc dans le domaine de l’architecture, et tout particulièrement dans l’érection d’édifices cultuels, que les plus grands bâtiments seront réalisés. Et comme les fonds investis dans ces constructions proviennent d’Europe, les modèles utilisés sont pris sur les plans d’édifices européens. Ces constructions sont autant d’ateliers-écoles pour les ouvriers tananariviens.
Avec le temps, ces derniers gagnent en habileté technique pour aider les architectes français comme le Français Jully qui construit la Résidence de France à Ambohitsorohitra (1891-1892); ou les Anglais Cameron et Pool qui contribuent à doter la capitale d’un grand nombre de maisons confortables (1868-1880), telles celles à six pièces, modèle le plus courant, et celle plus réduite à quatre pièces. Toutes deux se distinguent par des colonnes de briques sur la façade et une véranda.
Ces habitations marquent un grand progrès par rapport aux anciennes: les tuiles remplacent le bois qui lui-même a supplanté le chaume ou les roseaux; les parquets de bois surélevés remplacent la terre battue; les vitres font leur apparition aux fenêtres. « La capitale de roseau et de bois périssables était devenue de pierres et de briques durables » (Sibree).
Les nouveaux modèles de maison à quatre ou six pièces ainsi que les édifices religieux se répandent rapidement d’abord dans l’Imerina, puis dans toute l’île. Car « les évangélistes qui partaient pour fonder de nouvelles missions emmenaient avec eux des maçons et des ouvriers de Tananarive ».
Mais les Européens ne se contentent pas de reconstruire la ville, ils font aussi beaucoup pour l’embellir. Ils apprennent aux habitants à cultiver de beaux arbres, des arbustes, des fleurs exotiques, inexistants auparavant. Eucalyptus, filaos, bougainvilleas, lilas du Cap sont plantés à partir de 1865. « Et vingt ans plus tard, on en rencontre partout » (Sibree).
Le goût des jardins et la culture des fleurs se propagent très rapidement chez les habitants d’Antananarivo. «Depuis les choux, les laitues jusqu’aux pruniers et aux pêchers, sans compter les roses, les œillets, tout est aussitôt recherché, planté, diffusé et adopté avec enthousiasme. »
La Mission catholique qui s’installe dans la capitale en novembre 1861, y est pour quelque chose. C’est dans son domaine d’Ambohipo qu’éclosent les projets d’utilisation des arbres en vue de l’urbanisme. Le parc qui est créé sur ses terrains alluvionaux des bords du lac et où sont testées 47 familles d’arbres tant européens qu’exotiques, restera l’ancêtre de tous les jardins publics d’Antananarivo. C’est là aussi que fonctionnent pour la première fois, ces nouveautés que représentent pour les Tananariviens un moulin à vent, une pompe aspirante et refoulante et enfin une charrue. C’est enfin à Ambohipo qu’ils prennent l’habitude de se procurer les premières pommes de terre, laitues, carottes, choux, céleris et artichauts.
De leur côté, les résidents anglais rivalisent pour obtenir les meilleurs plants et les meilleures graines.
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Un progrès rapide constaté dans la capitale
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