Dans sa politique de réunification et d’agrandissement de son royaume, Andrianampoinimerina (1745-1810) se tourne vers l’Andrantsay, dans l’actuel Vakinankaratra. Accompagné de son fils Laidama qui lui succèdera sous le nom de Radama Ier et qui fait son baptême du feu, il veut prendre Fandanana, place forte où règne Andriamanalina-Betsileo. La bataille est rude et finalement le roi de l’Imerina rentre bredouille dans sa capitale. Il revient un an plus tard, divisant ses troupes en deux groupes dont l’un est conduit par son fils.
Celui-ci doit arriver par l’Ouest et Andrianampoinimerina par l’Est. Le roi passe par Ambodiala qu’il vainc facilement. Il partage à nouveau ses troupes et envoie une partie à la rescousse de son fils. Puis il atteintt Manazary et Ambohidranandriana. Il est accompagné des Zanadrangorinimerina (Fils de Rangorinimerina du clan de sa grand-mère maternelle), des Tantsaha et des Manisotra, tous de vaillants guerriers. Aussitôt qu’il s’approche avec son armée, tous les habitants se barricadent dans le village bien protégé.
Comme à son habitude, Andrianampoinimerina commence par négocier en appelant les descendants d’Andriamasoandro, fils de Ralambo avec sa troisième épouse, à se soumettre sans lutter. Ceux-ci refusent. Le roi réitère son appel mais en vain. Le combat s’engage alors. La bataille est rude. Le roi est même blessé durant les assauts.
Au bout de cinq jours, les Andriamasoandro connaissent une défaite cuisante à la suite de la mort de leur chef, Andriamanimahamiry, mais aussi et surtout parce que le souverain merina coupe tout le système
d’adduction d’eau dans le village. Celui-ci tombe, ouvert, dit-on, par le Conseil des Sages face au problème crucial né de la coupure de l’eau.
Andrianampoinimerina installe les Zanadrangorinimerina et leur donne Bekàka nom donné à la plaine d’Ambohimanarivo, et Lavadrano, ensemble des rizières d’Ambohidranandriana et d’Ambohitsimanova. C’est-à-dire la quasi-totalité du fief d’Ambohidranandriana à l’exception de Tongarivo. Et comme le seigneur est mort au combat, Andrianampoinimerina décréte que ses fils (tous ceux qui portent le nom du père ou Zanadray) seront dépossédés de tout domaine pour avoir tiré sur lui. Cette mesure ne touche toutefois que la famille d’Andriamanimahamiry qu’il relègue parmi les « Havanandriana » sans fief, « et non tous les Andriamasoandro », indique Emmanuel Fauroux.
En outre, à l’époque prononcer le nom du seigneur vaincu est tabou. Certains historiens affirment que son corps est même laissé sans sépulture. Mais d’après les Zanadray actuels, il est enseveli au nord-est du « Kianja », grande place située au « zoro firarazana », coin sacré des Malgaches en général, des Merina en particulier, à sa demande. Car il aurait précisé, de son vivant, qu’il souhaite être enterré tout simplement, « là où son peuple pouvait le voir ».
Avec la conquête merina, les travaux de mise en valeur des vastes plaines fertiles d’Ambohimanarivo, en grande partie délaissée jusque-là car elles étaient indéfendables contre d’éventuelles agressions, se poursuivent puisqu’il n’y a plus d’ennemis à craindre. Une garnison de soldats merina y est même installée et le village devient le centre politique et administratif aux dépens d’Ambohidranandriana. Une tendance à la division apparait alors. Cela se constate surtout à l’essaimage des tombeaux. Le tombeau d’origine commune se trouverait à Miadanimerina où aurait été enseveli Andrianjafimasoandro, descendant direct d’Andriamasoandro, décédé lors de la marche des Andriamasoandro vers Ambohidranandriana.
Outre cette tombe, les plus anciens tombeaux de la contrée (hormis celui des Andrianove) sont les trois que l’on trouve à Ambohimitsivalana. Emmanuel Fauroux explique ces « tombeaux des trois frères » comme appartenant tous aux Andriamasoandro. Celui des Zanadray est situé le plus au nord car ils sont de la lignée aînée; celui des Marolahy se trouve au centre; et celui des Maromena, de la lignée cadette, est construit au Sud. Toutefois, les Zanadray actuels soutiennent que seule leur lignée est issue d’Andriamasoandro et que derrière les termes « trois frères », il faut surtout entendre « frères de sang », le départ de l’Imerina s’étant fait sur la base d’un pacte reliant les Andriana à leurs dépendants.
Dans tous les cas, à l’origine il n’y a qu’un seul « Famadihana », les trois tombeaux étant ouverts simultanément. Par la suite, à partir de 1860-1880, les « lignées » organisent des cérémonies séparées. Puis les deux tombeaux du nord s’avérant trop petits, deux autres sont bâtis: celui dit Rafilibera pour les Zanadray et celui d’Ambohimanatrika pour les Marolahy.
Beaucoup plus tard, la mésalliance commence à se voir parmi les Andriamasoandro qui veulent préserver leurs descendants des conséquences physiques et mentales de l’endogamie. Le tombeau des Zanadrainy à Ambohimitsivalana n’est plus ouvert, même pour les exhumations, car les dépouilles des ancêtres ne peuvent être touchées par des personnes qui n’ont plus le « sang pur ». En revanche, le tombeau d’Amboninandrainarivo dit Rafilibera est toujours utilisé.
Texte : Pela Ravalitera – Photo : Archives personnelles