Très peu de pêcheurs du lac Tampolo ne vivent uniquement que de la pêche et bon nombre possèdent des rizières, quelques-uns des bœufs. Il est certain qu’à Tampolo, comme sur pratiquement tous les lacs de Madagascar, les habitants se contentent de capturer des quantités suffisantes pour assurer un minimum vital
En outre, les pêcheurs sont tenus de respecter des « fomba » (coutumes) et des « fady » (interdits). Ainsi autrefois, les filets sont « fady» (utilisation défendue par la coutume), « mais il ne s’agissait pas en réalité d’un interdit absolu, mais plutôt d’une non-utilisation de certains engins par les ancêtres » (A. Kiener, inspecteur principal de la direction des Eaux et forêts, 1960).
De longue date, le filet est connu à Madagascar, en particulier le filet-senne fabriqué en cordes de « hafotra ». Mais à Tampolo, la coutume, pour des raisons peut-être oubliées, interdit le filet. « Ce n’est qu’assez récemment que les pêcheurs se laissent tenter par son utilisation, en raison même des fortes augmentations de production qu’il permet d’obtenir. »
Est également « fady », l’utilisation du poison, en particulier celle du latex d’une plante vénéneuse appelée « jemby », dont l’écorce est écrasée et déversée dans l’eau. Les poissons meurent, mais restent comestibles. « Ce poison est quelquefois utilisé de nos jours (1960), mais fort heureusement assez rarement et son utilisation constitue un délit. »
Un Raiamandreny (patriarche) des pêcheurs de Rantolava raconte à l’auteur la légende du « lolorano » du lac, mauvais esprit diabolique qui peut causer la mort des êtres humains. Lorsqu’il veut se manifester, son action est précédée par l’apparition brusque d’un arc-en-ciel. À ce moment-là, la pirogue de sa victime chavire et celle-ci meurt par noyade.
Il est aussi de tradition de tuer un bœuf chaque année sur la pointe de terre qui s’avance dans la grande cuvette centrale, afin de purger le lac de toute impureté.
Une autre légende, mais fort jolie, est celle des Zazavavindrano ou nymphes des eaux qui vivent près des « vinany » (embouchures). D’ailleurs, « le mot vinany qui veut dire maminany, c’est-à-dire le rêve de deux eaux (qui se rencontrent), n’est-il pas déjà, en lui-même, très poétique »
La légende veut que ces nymphes habitent la dune qui se forme près de la sortie des eaux ou les zones voisines. En réalité, les hommes ont accumulé de tout temps des troncs d’arbres flottants dans une zone calme, au voisinage des embouchures, afin qu’elles puissent venir y habiter ou s’y reposer. Au moment où le « vinany » cède sous la poussée des eaux, les pêcheurs retiennent autant que possible ces arbres pour éviter le départ de ces divinités à la mer.
Au moment des très hautes eaux, quand il est souhaitable que la dune cède sous leur poussée, la légende veut que ces Zazavavindrano préparent, de leurs petites mains, le chemin aux eaux qui doivent aller à la mer. Mais comme elles ne sont pas très fortes et qu’elles n’arrivent pas à creuser suffisamment la dune, il est de coutume que les pêcheurs les aident en creusant un canal.
Pour ce travail, l’utilisation du fer est formellement interdite afin de ne pas blesser ces demoiselles cachées sous le sable. De ce fait, les habitants emploient uniquement des pagaies en bois. Si le travail s’avère long et pénible, un bœuf est tué pour donner des forces aux travailleurs. À la grande joie de tous, le village fête par la suite les pêches miraculeuses escomptées avec la baisse des eaux et
la rentrée providentielle des poissons.
Pela Ravalitera
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Des « fomba » et des « fady » à respecter au lac Tampolo
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