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Channel: Notes du passé – L'Express de Madagascar
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Des chutes de Farahantsana aux eaux de Manareza

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Jeter les « tsiny » à Farahantsana, régler ses comptes à Manareza. Anecdotes historiques ou petites légendes explicatives, de nombreux sites malgaches dont certains sont peu connus, en recèlent. Il en est ainsi des Iles Barren, situées au sud-ouest de Mainti­rano, dans le Canal de Mozam­bique. Elles ont pour nom Nosy Lava- tristement célèbre à cause de certains de ses habitants indésirables-, Nosy Dondosy, Nosy Androtra, Nosy Maroantaly et Nosy Mavony.
Le nom des Iles Barren ou Iles stériles leur est donnée par Van Keulen en 1753, mais elles sont connues dès le XVIe siècle. En 1529, Ribero et la plupart des anciens cartographes les appellent Basses de Pracel (Blancs d’écueils), entourées qu’elles sont de bancs qui forment les limites maritimes de Madagascar et qui se prolongent de la côte Ouest jusqu’au cap Saint-André.
Les frères Jean et Raoul Parmentier, dans leur relation sur la navigation le long de la côte occidentale de Madagascar en 1529, leur donnent le nom des Iles de la Crainte à cause, disent-ils, « des craintes qu’elles nous donnèrent ». Ils les baptisent chacune d’un nom propre. La première, proche de la terre ferme, l’Isle Majeure (Nosy Lava) ; la deuxième, L’Enchaînée (Nosy Dondosy); la troisième, La Boquillone (Nosy Andrano) ; la quatrième, Lintille ou L’Utile (Nosy Mangily) ; la cinquième, l’Isle Saint-Pierre (Nosy Androtra) ; la sixième, L’Andouille (Nosy Maroantaly) ; et la septième, L’Aventurée (Nosy Mavony).
Abordons maintenant la littérature, d’abord avec Farahantsana (la dernière cascade) qui s‘entend surtout dans les Kabary. C’est l’une des chutes les plus importantes de l’Ikopa, près d’Ambohi­manoa, à 40 km au nord et en aval d’Antananarivo. On fait souvent allusion à cette chute en parlant des « tsiny » jetés au-delà de Farahantsana pour qu’ils ne puissent plus jamais revenir.
Autre propos : boire l’eau de Manangareza ou de Manareza. C’est une rivière qui coule au sud de la ville de Toamasina. Pourtant de très peu d’importance, elle est entrée dans des expressions très courantes. Parmi celles-ci, « ambadik’i Manareza », au-delà de Manareza, qu’on a coutume de citer pour dire d’une affaire qu’elle est réglée, qu’elle n’est à plus remettre en cause.
L’origine de cette expression est différemment expliquée, bien qu’elle se rapporte à une unique et même circonstance. Radama Ier vient conquérir Toamasina en 1823. D’aucuns racontent que, lors de cette expédition, le souverain merina, devenu le nouveau maître, devait régler les litiges entre les autochtones de la région. Ceux-ci sont invités, s’ils ont des doléances, à se présenter devant lui sans délai, avant qu’il ne reparte « au-delà de Manareza ».
D’autres plus nombreux rapportent, en revanche, qu’avant même de franchir Manareza, Radama reçoit la soumission des roitelets locaux. Un serment solennel a alors lieu, aux termes duquel ce qui est « fait et juré ce jour-là et à cet endroit » serait tenu pour toujours sans qu’il soit possible d’y revenir. L’expression « au-delà de Manareza » marque donc « un acte public situé aussi bien dans le temps que dans l’espace».
Mais il est une expression plus connue, « nisotro ny ranon’i Manangareza » (qui a bu l’eau de Manangareza) qu’on cite souvent pour caractériser la nostalgie de Madagascar qui guette les étrangers quand ils rentrent dans leur pays.
Parlons enfin de la cité ouvrière bâtie par Jean Laborde en 1837, aux environs de Mantasoa et qu’il a baptisée « Soatsimanampiovana », la belle qui ne change pas. Créée dans un emplacement idéal à la lisière de la forêt orientale et sur la rivière Varahina, Soatsimanam­piovana est une belle et grande réalisation à une époque où il n’y a encore quasi rien à Madagascar en fait d’industrie.
Laborde construit deux lacs artificiels dont l’un, le Ranofito, recueille les eaux de sept petites rivières. Les eaux de ces deux lacs, retenues par des barrages solides, font fonctionner les machines d’au moins 14 usines, dont les principales s’occupent de savonnerie, tannage, porcelaine, verre, papier, fer…
À côté d’elles se trouvent les locaux d’élevage de vers à soie, les divers magasins, les poudrières et, disposées çà et là mais dans un ordre harmonieux, les cases d’habitation des surveillants et ouvriers, et les maisons de plaisance du Premier ministre et des officiers quand il leur plaît de s’y rendre. Laborde n’oublie rien, pas même son tombeau en belles pierres taillées qu’il fait dresser au milieu de la cité.

Texte : Pela Ravalitera – Photo : Archives personnelles


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