Le territoire de l’Imerina est occupé depuis une époque reculée, antérieure au XIVe siècle, par divers groupes d’origine indonésienne et qui y sont arrivés par vagues successives venant des côtes Est et Ouest. G. Lejamble cite notamment les Rekaka, les Kinitony, les Marosoa, les Vazimba.
Dans son étude sur les
« Fondements du pouvoir royal en Imerina » dont il publie des
extraits dans le Bulletin de Madagascar d’avril 1972, il explique qu’il s’agit de clans très clairsemés de quarante à quatre vingt individus, vivant de cueillette et de la culture primitive de tubercules. Les sociétés sont formées par la juxtaposition de plusieurs familles d’origine commune et dont les décisions générales sont prises en assemblée du clan.
Plus tard, des chefs apparaissent, peut-être quand la multiplication entraîne des conflits entre eux. « Les premiers clans se fractionnent, des chefs de familles vont former de nouveaux villages loin du lieu d’origine. »
Toutefois, les liens claniques persistent et « l’endogamie est préférée à l’exogamie, surtout lorsque le pouvoir des chefs est renforcé ». Selon l’auteur, c’est le cas quand vers la fin du XVe siècle, le clan d’Ampandrana développe sa puissance « sous l’effet d’une acculturation arabo-islamique apportée par des migrants venant des ethnies antambahoaka et tanosy en particulier », et dont l’influence se poursuivra jusqu’au XIXe siècle.
« L’utilisation systématique du fer pour la fabrication de javelots et de bêches, donne au clan des moyens d’extension et fait d’Andriamanelo le premier roi dominant plusieurs groupes, soit par la violence soit par l’alliance, elle-même facilitée par la puissance grandissante du clan d’Ampandrana. » C’est sur cette assise historique que se développe la « culture royale », ensemble de coutumes propres à la famille royale et au roi, univers imprégné de sacralité (hasina…) et de magie (idoles royales, objets de culte, devins et sorciers).
Les ancêtres des rois et reines sont un élément capital de l’équilibre politique de l’Imerina.
« Tout en protégeant et en aidant leurs descendants, comme les ancêtres de toute famille, ils intervenaient constamment dans le maintien te l’accroissement de leur pouvoir et de leur royaume. »
D’après G. Lejamble, la force et le rôle de cette croyance se montrent de manière très caractéristique, lors de la persécution des chrétiens et après la conversion de la reine au christianisme.
« Lorsque le juge de Ranavalona Ire interroge les chrétiens, il leur demande s’ils n’invoqueront plus les Douze montagnes (où gisent les ancêtres royaux), la puissance sacrée des Douze rois et les idoles » (Pasteur Rabary, « Daty malaza »).
L’invocation aux ancêtres royaux n’est pas seulement un acte religieux comme dans toute famille. C’est aussi un acte politique puisque le souverain tient sa puissance de ses ancêtres. « Ne pas invoquer ceux-ci était donc trahir le souverain et s’exclure de la communauté merina. » De même, après la conversion de Ranavalona II au christianisme et la destruction des « sampy » (idoles), les reines invoquent toujours les ancêtres mais désormais avec Dieu.
Les idoles sont « faites de morceaux de racines prélevées en creusant au pied des arbres. Elles sont taillées et ornées de soies et de perles, d’anneaux d’argent ». Cependant, leur existence est liée aux « ranakandriana » (génies, divinités secondaires) qui ordonnent aux hommes, dans leur rêve, leur confection. Il semble pourtant que les souverains successifs s’approprient aussi de « sampy » régionaux au cours de leurs conquêtes pour en faire des idoles royales.
C’est le cas de Kelimalaza. Elle est acquise par Ralambo et ses vertus sont, dit-on, universelles. Elle protège les récoltes, la santé, soutient le roi et préserve le royaume. Elle est considérée comme la reine des idoles.
« Ralambo fut le premier à l’utiliser à des fins militaires. »
Fantaka est aussi obtenue par ce roi de l’Imerina et employée à des fins militaires également.
Mahavaly vient du Sud-Est (Matitanana) sous le règne d’Andriantsitakatrandriana. Elle est surtout connue, sous le règne d’Andriamasinavalona, dans le rôle de détecteur des forces néfastes.
Manjakatsiroa vient aussi du Sud. Comme son nom l’indique, elle est utilisée par Andrianampoinimerina pour assurer l’unification et l’extension du royaume.
D’autres « sampy » sont acquis ou confisqués par les rois successifs, mais les quatre évoqués plus précédemment sont considérés comme les « aînées » des idoles royales. La formule traditionnelle en cite une douzaine, diverses sources parlent d’une quinzaine, mais selon l’ « Histoire des Rois », seules six sont considérées comme associées à la royauté.
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Les ancêtres royaux, un élément capital de l’équilibre politique
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